

Au procès Jubillar, la cour entre dans les détails de l'enquête
Au troisième jour du procès de Cédric Jubillar, accusé du meurtre de son épouse Delphine, l'attention des assises du Tarn se porte mercredi sur des témoignages ainsi que sur la suite du récit détaillé des investigations dont la qualité est contestée par la défense.
La cour a débuté les débats par l'audition de témoins ayant contacté les gendarmes dans la foulée de la disparition de Delphine Jubillar le 16 décembre 2020.
A l'aube de cette journée, un chauffeur de taxi affirme ainsi avoir aperçu "une silhouette en doudoune beige marchant sur le côté droit, en direction de Gaillac", un "petit gabarit" mais sans pouvoir affirmer qu'il s'agissait d'une femme, à cause de "la brume" et du fait qu'il roulait à 60 km/h.
Ce matin-là, un autre automobiliste se rendant à son travail, appelé également à la barre, dit quant à lui avoir aperçu une voiture stationnée sur un chemin avec le plafonnier allumé, un véhicule qu'a également vu une de ses collègues, qui confirme.
Deux gendarmes doivent encore témoigner ainsi que les officiers en charge de l'enquête.
Appel au 17 de Cédric Jubillar à 4h17, arrivée de la patrouille une grosse demi-heure plus tard, comportement de l'époux, premières constatations tandis que les deux enfants du couple dormaient dans la maison à moitié terminée... Le récit des deux gendarmes a balayé des faits largement connus du dossier.
- Omission -
Mais Mes Franck et Martin ont pointé un élément du témoignage de la meilleure amie de Delphine, omis par les gendarmes et qui, selon le procès-verbal produit ce matin-là, aurait dit qu'il arrivait à Delphine "de se balader régulièrement à pied la nuit".
Un élément qui contredit la thèse de l'accusation selon laquelle l'infirmière de 33 ans avait peur du noir et ne sortait jamais seule la nuit.
Autre point de friction: ni les deux patrouilleuses ni leur supérieur hiérarchique n'ont mentionné la présence d'un "petit fourgon blanc" garé devant le domicile des Jubillar, qui aurait pu bloquer la vue d'un témoin. Tous trois ont assuré ne pas l'avoir vu, sans pour autant exclure qu'il ait pu être garé là.
En fin d'audience mardi, Me Martin a enfin reproché au major qui dirigeait à l'époque la communauté de brigades basée à Cagnac-les-Mines d'avoir conduit une enquête exclusivement orientée vers Cédric Jubillar. "Les premiers actes que vous allez mener sont des actes à l'encontre de Cédric Jubillar, vous ne pensez qu'à lui".
"Je n'ai pas dit ça", a réfuté l'enquêteur. "Aucune piste, par expérience, ne peut être écartée et bien entendu la famille est dans le noyau des personnes qui peuvent être à l'origine de la disparition", a-t-il précisé.
"Toute la démarche de la défense est de faire de la dilution et de la diversion, a regretté auprès de l'AFP Laurent de Caunes, l'avocat des frères et sœur de Delphine Jubillar, déplorant une perte de temps.
- "Colère" -
Le portrait de la disparue, "timide" mais dévouée, "discrète" et bienveillante, avait auparavant été dressé par un enquêteur de personnalité dont le rapport a été salué par sa famille pour sa justesse.
Peu après, l'administratrice des enfants du couple, mandatée par la justice pour défendre leurs intérêts, avait décrit Louis, 11 ans, comme un enfant "taiseux", "très, très en colère" contre son père, qu'il juge responsable de la disparition de sa mère lorsqu'il n'avait que 6 ans et sa sœur Elyah 18 mois.
"Il va falloir qu'ils essaient d'avancer avec ce traumatisme et la première personne qui peut les amener à bien évoluer, c'est vous, M. Jubillar, en répondant à leurs questions", a-t-elle exhorté, en se tournant vers l'accusé qui, depuis son box, a opiné de la tête.
Ce peintre-plaquiste de 38 ans, détenu depuis juin 2021, dément avoir tué celle qui était sa compagne depuis leurs 18 ans et qui lui avait annoncé sa volonté de divorcer.
Le verdict est attendu le 17 octobre.
A.Kenny--MP