

Procès Jubillar: pour les parties civiles, la solidité de l'enquête démontre un "féminicide"
Les premiers avocats des parties civiles à plaider mardi devant les assises du Tarn ont insisté sur la solidité d'une "enquête honnête et exhaustive" qui permet selon eux de démontrer que l'affaire Jubillar est celle d'un "féminicide".
"Toutes les pièces s'assemblent pour former ce puzzle de la vérité, qui est que, ce soir-là, Cédric Jubillar a bien tué son épouse", a souligné Philippe Pressecq, qui défend les intérêts d'une des cousines de Delphine Jubillar, née Aussaguel.
L'avocat a appuyé sur le fait que la gendarmerie, dans la foulée de la nuit de sa disparition, du 15 au 16 décembre 2020, avait déployé "des moyens technologiques et humains inédits".
"Est-ce une enquête orientée, superficielle ou malhonnête? Non", a martelé le conseil, réfutant les arguments d'une défense qui n'a eu de cesse de dénoncer les "imprécisions" voire les "mensonges" de l'enquête mais, a fait remarquer l'avocat, n'a demandé l'annulation d'aucun acte de procédure alors qu'elle en avait la possibilité.
Dans son sillage, Mourad Battikh, avocat de plusieurs cousins, oncles et tantes de Delphine, mais aussi depuis lundi de son amant qui a annoncé se constituer partie civile, a lui aussi insisté sur le faisceau d'indices réunis contre M. Jubillar, des éléments qui sont autant de "caméras", "d'angles de vue" démontrant le crime.
- Lunettes "fracassées" -
L'avocat a listé, de son débit rythmé au style direct et imagé, le témoignage de Louis, le fils du couple qui a évoqué une dispute entre ces parents ce soir-là, les lunettes "fracassées" de l'infirmière qui établissent la violence, ou encore le téléphone de la disparue qui continue à borner près de son domicile le matin du 16, écartant la thèse d'un rôdeur ou d'un départ volontaire.
Il a également dépeint un Cédric Jubillar "menteur" qui cherche, par ses affirmations, à entraîner les jurés "loin de chez lui", car "dans les cas de féminicide, on peut naturellement convoquer l'image du rôdeur dans la nuit noire et froide" alors que "la réalité est tristement plus banale": dans ce type de crime, "l'endroit le plus dangereux (...) c'est la cuisine, la chambre à coucher, le salon".
La thèse du féminicide est également celle sur laquelle s'est appesantie Pauline Rongier, l'avocate d'une amie de Delphine Jubillar, qui a demandé aux jurés de trouver le "courage" de condamner l'accusé malgré l'absence de corps, car cette affaire constitue un "cas d'école", voire un "paroxysme du féminicide".
Paroxysme, "car il l'a tuée, mais en plus, l'a fait disparaître, peut-être à jamais", a-t-elle insisté, estimant que "cette absence de corps n'est pas une preuve en moins" mais "une sauvagerie en plus".
"Isolement" de son épouse, dénigrement, "surveillance", "violences sur les enfants", Pauline Rongier a décrit la "chape de plomb, la prison dans laquelle était Delphine", ce "contrôle coercitif" exercé par Cédric sur son épouse qui, selon elle, précède la plupart des féminicides.
Dans son box vitré, l'accusé a continué mardi de montrer quelques signes de nervosité, se grattant la tête puis l'arête du nez, notamment lorsque s'est avancée à la barre l'avocate de sa mère, assise non du côté de la défense, mais des parties civiles.
- "Rien à gagner" -
"Moi aussi, je veux la vérité, quelle qu'elle soit", avait lancé Nadine Jubillar lors de sa déposition.
Qu'elle soit assise sur le banc des victimes, "c'est à l'image de sa vie", a estimé mardi son avocate Géraldine Vallat, à propos de sa cliente qui a donné naissance à Cédric à 16 ans, avant qu'il ne soit placé en famille d'accueil à deux reprises.
Cette mère "n'a rien à gagner dans ce procès contre son fils", a souligné l'avocate, affirmant qu'elle sortirait "d'ici avec un verdict, une vérité judiciaire" pour avancer avec ses petits-enfants, Louis et Elyah.
Après les plaidoiries des parties civiles qui devraient se poursuivre jusqu'à mercredi matin, les avocats généraux prendront la parole, ainsi que la défense, jeudi.
Vendredi, l'accusé aura une dernière fois l'occasion de s'exprimer avant que la cour ne se retire pour délibérer puis rende son verdict.
C.Maier--MP