En Espagne, le gouvernement et la justice vont enquêter sur les causes de la méga-coupure de lundi
Le gouvernement espagnol et la justice madrilène, qui va ouvrir une enquête sur un éventuel sabotage informatique, vont se pencher sur les causes de la méga-panne électrique qui a privé lundi toute la péninsule ibérique électrique de courant pendant de nombreuses heures.
Toutes "les mesures nécessaires seront prises pour que cela ne se reproduise pas", a assuré mardi le Premier ministre socialiste Pedro Sánchez lors d'une conférence de presse, annonçant la création d'une commission d'enquête chapeautée par le ministère de la Transition écologique.
"Les techniciens du réseau électrique continuent à réaliser une analyse de leur système. Nous attendons de recevoir leurs résultats préliminaires dans les prochaines heures ou prochains jours", a-t-il expliqué.
"Aucune hypothèse ne sera écartée tant que nous ne disposerons pas de ces résultats d'analyse", a-t-il aussi déclaré.
Quasiment au même moment, un juge de l'Audience nationale, la juridiction madrilène en charge des affaires les plus graves, dont celles de terrorisme, a de son côté annoncé l'ouverture d'une enquête sur un éventuel "sabotage informatique".
L'objectif de ces investigations? "Déterminer si la panne de courant survenue hier dans le réseau électrique espagnol qui a affecté tout le pays, pourrait être un acte de cyber-sabotage contre des infrastructures critiques espagnoles et, si tel est le cas, pourrait être qualifiée de délit terroriste", résume un communiqué.
- "Ignorance" -
A la mi-journée, la piste de la cyberattaque avait pourtant été écartée par le gestionnaire du réseau électrique espagnol (REE).
"Au vu des analyses que nous avons pu réaliser jusqu'à présent, nous pouvons écarter un incident de cybersécurité dans les installations du réseau électrique", a assuré Eduardo Prieto, directeur des opérations du gestionnaire de REE.
Une piste également exclue par le gouvernement portugais, même si les causes de cet évènement inédit restent encore à préciser, REE ayant évoqué dès lundi soir une "forte oscillation des flux de puissance" sur le réseau électrique "accompagnée d'une perte de production très importante", un phénomène ayant entraîné la déconnexion du système espagnol du réseau européen.
Lors de sa conférence de presse mardi en début d'après-midi, Pedro Sánchez a également pris soin d'assurer que la méga-panne électrique n'était pas liée à un manque d'énergie nucléaire en Espagne, rejetant les critiques émises notamment par le parti d'extrême droite Vox, et relayées aussi par de nombreux utilisateurs sur les réseaux sociaux.
"Ceux qui lient cet incident au manque de nucléaire mentent franchement ou démontrent leur ignorance", a insisté le chef du gouvernement espagnol.
La question du nucléaire est au coeur du débat politique depuis plusieurs mois en Espagne, dont le gouvernement a annoncé la prochaine fermeture de deux de ses cinq derniers réacteurs, qui pèsent pour 20% de son mix électrique, contre 40% pour le solaire et l'éolien.
Selon REE, le système électrique espagnol, qui avait été remis en marche à plus de 99% mardi matin, était à la mi-journée pleinement opérationnel, comme le réseau portugais selon l'opérateur REN.
Il a permis de rétablir le trafic ferroviaire sur plusieurs grands axes, dont Madrid-Séville et Madrid-Barcelone, selon la compagnie nationale Renfe.
A la gare d'Atocha, la situation restait encore compliquée mardi matin, avec une foule de passagers attendant désespérément leur train. A chaque annonce d'un départ, les voyageurs applaudissent, ont constaté des journalistes de l'AFP.
- "Après-midi de répit" -
A Madrid, bars et magasins ont rouvert progressivement leurs portes mardi matin, reprenant une activité normale après avoir dû pour la plupart fermer leurs portes dans la précipitation lundi.
La plupart des écoles ont également accueilli normalement les élèves, même si le système espagnol très décentralisé laisse une grande latitude aux différentes régions pour trancher ces questions.
Déjà, les Espagnols tirent des leçons de cette extinction subite de tout le système électrique.
Avoir chez soi un transistor, des piles, des bougies et du liquide: c'est ce que beaucoup retiennent, comme Valentin Santiago, technicien environnemental de 48 ans, qui ne souhaite "jamais, ô grand jamais" se séparer de sa bonbonne de gaz.
"Ca a été une après-midi de répit, une pause technologie, une déconnexion improvisée. (...) On est prêts pour n'importe quoi depuis la pandémie, tout nous paraît plus simple", estime de son côté Marcos Garcia, un avocat madrilène âgé de 32 ans.
Le retour complet à la normale était attendu avec impatience en Espagne comme au Portugal après une longue journée passée à jongler avec les difficultés, entre métros fermés, bus saturés, trains bloqués et communications extrêmement difficiles.
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A.Roth--MP