

Le PKK accuse la Turquie de traîner sur le processus de paix
Le Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK), qui s'est engagé à déposer les armes après quatre décennies de lutte armée contre Ankara, juge à la veille d'une cérémonie annoncée comme imminente que la Turquie n'a pas fait sa part.
"Nous sommes prêts, mais c'est le gouvernement (turc) qui n'a pas pas pris les mesures nécessaires" pour conclure le processus, a déclaré mercredi Mustafa Karasu, un des fondateurs et hauts responsables du PKK, à la chaîne de télévision Medya Haber, proche du mouvement.
Deux commandants du PKK basés en Irak ainsi que des médias kurdes ont laissé entendre récemment qu'une première cérémonie de désarmement aurait lieu, "en signe de bonne volonté", entre le 3 et le 10 juillet dans le nord de l'Irak, où sont repliés les combattants kurdes.
Mais M. Karasu ne confirme pas cette opération ni sa date.
"Un groupe au sein de l’État (turc) cherche à saboter le processus", affirme-t-il.
"L’État turc doit remplir ses obligations. (...) Il n'existe pas à ce stade des mesures qui pourraient susciter de l'optimisme. Nous voulons mener le processus à son terme. Notre approche et notre attitude sur cette question sont parfaitement cohérentes", insiste-t-il, en accusant l'armée turque de "continuer ses attaques" contre les forces du PKK dans les montagnes irakiennes.
- Isolement maintenu -
M. Karasu regrette également que les conditions de détention du père fondateur du PKK, Abdullah Öcalan, ne se soient pas améliorées.
Détenu à l'isolement sur l'île-prison d'Imrali au large d'Istanbul depuis 1999, M. Öcalan, 76 ans, que ses partisans appellent affectueusement "Apo" ("Oncle", en kurde), a appelé fin février le PKK à se dissoudre et à renoncer à la lutte armée.
"La situation de notre chef, Apo, affecte le processus et le ralentit", juge M. Karasu.
"Certains amis se sont rendus à Imrali mais ce n'est pas suffisant", poursuit-il, en estimant que la détention sévère du chef du PKK génère "beaucoup d'incompréhension autour du processus" engagé, alors même, rappelle-t-il, que M. Öcalan a su saisir la main tendue par le gouvernement turc.
En octobre, l'allié nationaliste du gouvernement du président turc Recep Tayyip Erdogan, Devlet Bahceli, avait plaidé "le droit à l'espoir" en appelant le PKK à déposer les armes.
"Je ne dis pas que le processus est bloqué", continue M. Karasu. "Nous voulons qu'il continue et s'épanouisse. Mais la situation nous conduit à constater le blocage. L'attitude du gouvernement en est la cause".
Ces déclarations viennent doucher la perspective d'un début de désarmement imminent, après des décennies de violences qui ont fait au moins 45.000 morts.
Selon les médias kurdes dans le nord de l'Irak, une cérémonie semblait près de se tenir en présence de représentants de partis politiques, d'observateurs locaux et de journalistes.
Un message de M. Öcalan était attendu à cette occasion.
Le PKK a annoncé le 12 mai sa dissolution, répondant à un appel lancé fin février par son chef historique, qui reste sa figure tutélaire et vénérée malgré les années de détention.
Le président turc Recep Tayyip Erdogan avait de son côté indiqué la semaine dernière qu'il rencontrerait dans les prochains jours une délégation du parti turc pro-kurde DEM, qui a joué un rôle clé d'intermédiaire entre Abdullah Öcalan et Ankara.
A.Meyer--MP