

Pour l'experte de l'ONU Francesca Albanese, les sanctions américaines visent à la "salir"
La rapporteure spéciale de l'ONU pour les Territoires palestiniens, Francesca Albanese, a qualifié jeudi de "techniques mafieuses" visant à "salir" sa réputation les sanctions imposées par Washington pour ses critiques de la politique américaine dans la guerre à Gaza.
Elle a annoncé, lors d'un entretien avec l'AFP en Afrique du Sud, qu'elle présenterait son rapport à l'Assemblée générale des Nations Unies depuis ce pays ces prochains jours, les sanctions de Washington l'empêchant de se rendre à New York.
Le secrétaire d'Etat américain Marco Rubio avait annoncé en juillet des sanctions à son encontre, taxant de "partiales et malveillantes" ses critiques ouvertes d'Israël et des Etats-Unis.
"Je ne peux pas me rendre aux Etats-Unis", a déploré Mme Albanese auprès de l'AFP. "Mes avoirs ont été gelés. J'ai une fille américaine, mon mari travaille pour une organisation basée aux États-Unis et toute la famille paie à cause de cela", a regretté l'avocate italienne.
"Les sanctions que les États-Unis m'ont imposées constituent un véritable affront, non seulement pour moi mais aussi pour les Nations unies", a-t-elle jugé, les comparant aux "techniques mafieuses" de son pays natal : "Salir quelqu'un ... pour le ou la dissuader de continuer à s'engager sur les questions de justice".
"Je me répète sans cesse qu'il ne s'agit pas de moi", a-t-elle dit. "Il s'agit de défendre des gens qui sont victimes d'un génocide maintenant, et j'espère sincèrement que ce message continuera d'être entendu".
Francesca Albanese, mandatée par l'ONU mais qui ne parle pas en son nom, a fait l'objet de vives critiques de la part d'Israël et de certains de ses alliés au sujet de ses accusations selon lesquelles Israël commet un "génocide" à Gaza.
Une commission mandatée par l'ONU et plusieurs ONG, dont Amnesty International et Human Rights Watch, accusent également Israël de perpétrer un génocide à Gaza. Israël rejette ces allégations comme "mensongères" et "antisémites".
- "Complicité mondiale"' -
"Je ne pense pas être clivante mais, bien sûr, il y a des gens qui sont très bien équipés et intéressés à ruiner ma réputation pour que ce mesage ne soit pas transmis", fait valoir Francesca Albanese.
Dans une version préliminaire de son rapport, titrée "Génocide à Gaza: un crime collectif" et mise en ligne sur le site de l'ONU, elle dénonce ce qu'elle juge être "un système de complicité mondiale" des Etat occidentaux dans le drame à Gaza.
"Même lorsque la violence génocidaire est devenue visible, les États, principalement occidentaux, ont fourni et continuent de fournir à Israël un soutien militaire, diplomatique, économique et idéologique, alors même que (ce pays) a instrumentalisé la famine et l'aide humanitaire", écrit-elle.
Ces Etats "pourraient et devraient être tenus pour responsables d'avoir aidé, assisté ou participé à des actes" illicites, juge encore l'experte des droits de l'Homme dans ce texte.
Alors qu'une trêve fragile est actuellement en vigueur dans le cadre d'un accord visant à mettre fin à deux ans de guerre entre Israël et le mouvement islamiste palestinien Hamas, Francesca Albanese affirme que la communauté internationale et l'ordre multilatéral sont "mis à l'épreuve".
"Israël a poussé le monde à s'interroger sur sa capacité à prévenir un génocide, et jusqu'à présent nous avons échoué".
"La question est désormais : serons-nous tout aussi incapables d'arrêter le génocide et de le punir", s'est-elle interrogée.
- "Architecture financière" -
L'experte de l'ONU sur les droits de l'homme se trouve actuellement en Afrique du Sud – pays qui a déposé une requête pour génocide contre Israël devant la Cour internationale de Justice – pour assister à la conférence annuelle Nelson Mandela le 25 octobre.
La présentation de son rapport dans ce pays est "symbolique", a déclaré Francesca Albanese, qui a comparé le traitement des Palestiniens par Israël au régime d'apartheid et de ségrégation raciale d'avant 1994.
Mais l'Afrique du Sud, principal fournisseur de charbon d'Israël, figure dans son rapport sur la "complicité" des Etats.
C'est "un révélateur du monde dans lequel nous vivons", où "l'élimination, à terme, de l'architecture économique et financière qui soutient notre système et nos sociétés est au cœur du problème".
F.Hartmann--MP