

Trump sacre sans réserve l'IA dérégulée pour parvenir à une domination américaine
La Maison Blanche a dévoilé mercredi un plan d'action pour favoriser le développement sans entrave des modèles américains d'intelligence artificielle (IA) aux Etats-Unis et à l'étranger, écartant toutes les réserves sur ses possibles dérives.
"Nous ne laisserons aucune autre nation nous battre" dans la course à l'IA, a exhorté Donald Trump lors d'une conférence dédiée à cette technologie, à Washington.
"Nos enfants ne vivront pas sur une planète contrôlée par des algorithmes véhiculant les valeurs et les intérêts de nos adversaires", a-t-il ajouté, référence à peine voilée à la Chine.
Le plan d'action des Etats-Unis découle d'une large consultation des professionnels, chercheurs et usagers, initiée en février.
Le président américain entend rompre avec la ligne adoptée par son prédécesseur démocrate Joe Biden, partisan d'un essor contrôlé, avec un accent sur la sécurité et l'appréhension des risques.
La Maison Blanche dit avoir identifié quelque 90 mesures qui seront mises en musique "dans les prochaines semaines et mois", selon un communiqué.
Donald Trump a pris mercredi trois décrets autour d'axes majeurs de ce plan d'action.
Le premier axe vise à faciliter la construction de nouveaux centres de données (data centers), essentiels au fonctionnement de l'IA, et la réalisation de grands projets énergétiques pour répondre aux immenses besoins de ces data centers en électricité.
De très nombreux centres de données sont déjà actuellement en chantier aux Etats-Unis.
Le gouvernement Trump veut notamment simplifier l'octroi de permis et d'autorisations pour de nouveaux chantiers.
"Mon gouvernement va utiliser tous les outils en sa possession pour s'assurer que les Etats-Unis construisent et fassent tourner les infrastructures d'IA les plus grandes et les plus puissantes du monde", a promis le milliardaire républicain.
- "Ministère de la vérité IA" -
Le deuxième volet du plan concerne la "diplomatie IA", selon l'expression de David Sacks, principal conseiller de la Maison Blanche pour l'IA.
Elle implique, entre autres, la mobilisation de deux bras financiers des Etats-Unis pour le commerce international, l'Agence américaine de développement et de financement (FDC) et la Banque américaine d'import-export, afin qu'elles soutiennent les exportations d'IA américaine.
"Pour gagner cette course, il faut que les modèles (américains d'IA) soient utilisés dans le monde entier", a plaidé, lors d'un point de presse téléphonique, Michael Kratsios, le directeur des questions scientifiques et technologiques à la Maison Blanche.
"L'IA américaine doit être le standard de référence", a-t-il martelé.
Donald Trump a fait de la diffusion à l'étranger de la technologie américaine, et de l'IA en particulier, une priorité.
Il a contribué aux discussions qui ont amené les Emirats arabes unis à passer contrat, en mai, avec OpenAI, Oracle et Nvidia pour la création de leurs propres infrastructures d'IA.
"En matière de technologie IA (...), il est crucial que les entreprises américaines puissent être compétitives", a commenté un responsable du lobby technologique CCIA, saluant la capacité du plan d'action à "supprimer des barrières".
La troisième ligne directrice forte du programme ne porte pas sur la croissance de l'IA américaine mais se veut une réponse à ce que Donald Trump voit comme l'émergence d'une intelligence artificielle générative avec un "biais idéologique".
L'ancien promoteur immobilier entend ainsi interdire aux différents services, ministères et agences de son gouvernement d'acquérir des logiciels d'IA générative qui manifesteraient cette orientation et n'autoriser que "la vérité, l'équité et l'impartialité".
Un officiel américain a précisé que le "principal" biais idéologique relevait, selon la Maison Blanche, des initiatives encourageant la représentation et l'inclusion des minorités (DEI).
Cette directive pourrait "potentiellement faire disparaître les quelques garde-fous destinés à empêcher l'IA de perpétuer et exacerber des biais sociétaux existants", a critiqué l'association de défense des droits humains ACLU.
Pour le Centre pour la démocratie et la technologie (CDT), le gouvernement Trump se comporte "comme un ministère de la vérité IA" et cherche à forcer les grands acteurs à façonner des modèles "qui se conforment à son interprétation de la réalité".
Résolu à écarter le maximum d'obstacles, quels qu'ils soient, de la route de l'IA, l'administration Trump va missionner le régulateur des télécoms (FCC) pour identifier des contradictions possibles entre des lois d'encadrement prises par des Etats américains et les textes fédéraux en vigueur.
Une telle démarche pourrait affaiblir les protections mises en place par plusieurs Etats contre les dérives de l'IA, averti l'ACLU.
"Nous avons besoin de bon sens", a rétorqué Donald Trump, "un standard fédéral qui l'emporte sur les Etats" et leurs lois sur l'IA.
O.Wagner--MP